vendredi 16 novembre 2007

L’épreuve de tamazight au baccalauréat en france : des avancées, des difficultés

L’EPREUVE EN CHIFFRES Depuis 1995, le nombre de candidats en berbère est progressivement passé de 1350 à 2250 (session 2004 du Bac) pour l’ensemble des académies métropolitaines. Depuis cette date, les chiffres semblent stabilisés, avec tendance à un léger tassement (autour de 2000). Les candidats proviennent de toutes les académies de France (voir carte), avec une écrasante majorité pour la région parisienne et les grandes métropoles urbaines, à forte population d’origine nord-africaine (par ordre d’importance : le Nord (Lille-Roubaix), Amiens, Aix-Marseille, Lyon, St. Etienne). L’introduction de l’écrit a induit une différenciation de l’épreuve selon les variétés régionales : trois sujets (kabyle : Algérie du Nord), chleuh (Sud-ouest du Maroc), rifain (Nord-est du Maroc) sont proposés pour l’instant. Il s’agit des variétés de berbère les plus représentées en France : plus d’un million de Kabyles et au moins 500.000 berbérophones d’origine marocaine. Jusqu’en 2000, la répartition entre les dialectes a été conforme à ce que l’on pouvait attendre : une nette majorité pour le kabyle (plus de 60%), environ 40% pour les deux dialectes marocains - avec une percée inattendue pour le rifain dès son introduction en 1999. Puis, progressivement, l’équilibre entre les dialectes a évolué en faveur du Maroc, jusqu’à un véritable renversement de tendances : l’ensemble chleuh + rifain représente désormais environ 65% des copies (en 2004 : chleuh = 40%, rifain = 25%, kabyle = 35%). Et cette répartition semble stabilisée depuis. Elle traduit donc une certaine désaffection des Kabyles et une montée en puissance des berbérophones d’origine marocaine. DEROULEMENT DE L’EPREUVE Avec l’introduction de l’examen écrit, l’épreuve, d’une durée de deux heures, tend à adopter les pratiques en vigueur pour les langues obligatoires, tant au niveau de la difficulté des textes que des questions posées. Chacun des trois sujets proposés (kabyle, chleuh, rifain) comporte un texte berbère, en notation latine, de 15 à 20 lignes. Les mots rares ou présentant une difficulté sont expliqués ou commentés en note par un équivalent berbère. A partir de ce texte, deux types de questions sont posés : des questions de Compréhension (sur 8 points) : traduction de 10 à 15 lignes du texte berbère en français ; éventuellement des questions ponctuelles sur le texte, destinées à vérifier la bonne compréhension ; des questions de Compétence linguistique - expression écrite (sur 12 points) : trois à quatre questions, liées au texte, destinées à vérifier l’expression écrite en berbère. Comme pour toutes les autres épreuves de langue, les textes sont extraits de productions publiées. DE L’ORAL A L’ECRIT Depuis la session 1995, une épreuve facultative écrite de langue berbère peut être présentée au Baccalauréat (pour les séries générales et technologiques mais également pour certains examens professionnels). Le berbère s’intègre dans un ensemble de 27 langues qui ne font pas l’objet d’un enseignement dans les lycées, mais qui peuvent être présentées par les candidats, en matière supplémentaire (épreuve facultative : seuls les points au-dessus de la moyenne sont pris en compte pour le calcul de la moyenne finale à l’examen). Cette épreuve, organisée au plan national par l’Education nationale, fait, depuis sa création, l’objet d’une convention entre la Direction des Enseignements Scolaires (DGESCO) et l’INALCO qui, chaque année prépare les sujets et assure la correction des copies pour l’ensemble des académies. Antérieurement à 1995, l’épreuve, qui existait depuis au moins les années 1950, était passée exclusivement à l’oral, sur la base de textes que pouvaient préparer les candidats ou sous forme de conversation improvisée. C’est l’augmentation exponentielle du nombre de candidats qui a amené le Ministère de l’Education Nationale (MEN) à la transformer en épreuve écrite. En effet, pour les académies d’Ile-de-France, on était passé de 35 candidats pour les années 1978/79 à plus de 2000 en 1994. L’épreuve orale soulevait donc des problèmes d’organisation et était porteuse d’une certaine inégalité de traitement puisqu’elle ne pouvait être organisée que dans les académies où l’on disposait d’examinateurs répondant aux normes minimales de l’Education nationale (c’est-à-dire en Ile-de-France et, à partir de 1984, dans l’académie d’Aix-Marseille). Le passage à l’épreuve écrite permit donc au MEN à la fois d’organiser l’épreuve sur tout le territoire métropolitain et de régler le problème des examinateurs puisque l’ensemble des copies était corrigé par l’équipe berbérisante de l’INALCO. CONDITIONS DE PREPARATION ENCORE PRECAIRES Il n’existe pour l’instant aucun enseignement stabilisé de berbère dans les lycées et collèges français. Les annonces officielles sont récurrentes depuis 2002 mais la situation ne s’est pas améliorée. Ainsi, la seule possibilité réelle de préparation pour les candidats est de suivre des cours organisés par les associations culturelles berbères de France. Certains outils et supports émergent, tels que les « Annales du Bac » publiées en septembre 2006 dans le cadre de la convention MEN/INALCO et avec le soutien de la Coordination des Berbères de France (voir article en page 4). D’autres ouvrages devraient être prochainement édités. D’autre part, le Ministère de l’Éducation nationale a récemment ouvert, dans le cadre d’une convention signée le 14 février 2006 avec l’INALCO, la possibilité de mettre en place des classes de préparation à l’épreuve de berbère du Baccalauréat dans les lycées. Cette initiative devrait permettre d’améliorer progressivement les conditions de préparation. Force est cependant de constater que, pour l’instant, l’impact de cet accord demeure très limité, les moyens financiers de l’expérience n’ayant pas été dégagés par le MEN. Les élèves souhaitant préparer cette épreuve facultative restent donc tributaires de la bonne volonté des rectorats et/ou des chefs d’établissements.

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