mardi 13 novembre 2007
Mémorandum pour lutter contre toutes les formes de discriminations contre les Amazighs
Depuis la nuit de temps, le peuple amazigh (berbère) a toujours vécu en Afrique du Nord. C’est le peuple autochtone de cette partie monde. Même si celle-ci a vu l’arrivée de communautés humaines aussi diverses que variées (phéniciennes, roumaines, vandales, arabes, portugaises, françaises, espagnoles…) pour des raisons coloniales, commerciales ou religieuse ou tout simplement pour s’y établir ou s’y réfugier.
En fait, ce peuple, vieux comme le monde, a toujours vécu avec elles en bonne intelligence en préservant, coûte que coûte, sa culture et son identité. Malgré les vicissitudes de la fortune, le peuple marocain est, jusqu’au jour d’aujourd’hui, majoritairement amazigh.
Pour autant, depuis l’accession du Maroc à l’indépendance en 1956, la donne a changé radicalement. En raison de la présence massive des nationalistes extrémistes arabes dans les différentes sphères de l’État, l’existence du peuple amazigh est carrément mise à mal. Car il est systématiquement l’objet de toutes sortes de discriminations que ce soit dans sa vie quotidienne ou d’un point de vue législatif.
1- Niveau législatif :
a)- La Constitution marocaine stipule que seul l’arabe est la langue officielle du pays ignorant, totalement, la langue amazighe et refusant, catégoriquement, tout autre langue officielle. Tout cela en contradiction flagrante avec les engagements internationaux pris par le Maroc pour promouvoir la culture des droits de l’homme. On peut en citer : les recommandations prises par la Conférence mondiale de Vienne en 1993, le Pacte mondial de l’éducation et la motion onusienne 41/187 incitant à reconnaître la dimension culturelle dans les droits de l’homme et à élargir la participation à la vie culturelle.
b)- Il est formellement interdit à la justice, l’administration et tout autre institution publique d’utiliser la langue amazighe en vertu d’une loi d’arabisation promulguée le 25/01/1965.
c)- Il est interdit aux Amazighs de donner des prénoms amazighs à leur progéniture. Et cela en vertu d’une circulaire du Ministère de l’intérieur datant du 12/05/1997 et adressée à tous les walis et tous les gouverneurs dans toutes les régions du royaume. Une circulaire qui vient rectifier et compléter le 6e article du dahir émis le 08/03/1950(...)
d)- Le État marocain continue à appliquer les lois datant de l’époque du Protectorat. Elles concernent tout ce qui a trait à la propriété, les forêts et les mines. C’est au nom de ces mêmes lois que sont expropriées les tribus autochtones de leurs terres qui regorgent de toutes sortes de richesses minières ou forestières.
2- La vie quotidienne :
a)- Médias :
- La folklorisation systématique de la culture amazighe dans les médias officiels ;
- Le temps consacré dans les médias officiels à l’amazighité est extrêmement court, contrairement aux autres langues et cultures ;
- Dans le cas où des émissions amazighes sont programmées, ce qui est extrêmement rare, c’est toujours à des heures extrêmement tardives ou à des moments où peu de gens regardent ou écoutent leur radio ou leur télévision ;
- Le refus d’accorder tout soutien financier public aux journaux amazighs comme cela se fait avec les autres journaux arabes et français.
- Les atermoiements continuels de l’État marocain à créer une chaîne de télévision amazighe ;
- Les propos de Fayçal El Araichi, le président de la société nationale de la radio et de la télévision marocaine, par lesquels il a refusé, catégoriquement, lors d’un point de presse, l’utilisation de la langue amazighe dans la chaîne sportive, créée récemment.
b)- Enseignement :
- L’inexistence d’une réelle volonté pour faire intégrer la langue amazighe dans le système éducatif marocain malgré la signature d’un accord en bonne et due forme entre l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) et le Ministère de l’Éducation nationale ;
- La rareté des séances de formation au profit des professeurs de la langue amazighe ;
- La non disponibilité des supports pédagogiques dans pratiquement toutes les écoles ou la langue amazighe est enseignée ;
- Le marché n’est pas alimenté d’un nombre suffisant de livres amazighs;
- Le peu de cadres à même de suivre et évaluer la qualité de l’enseignement de la langue amazighe ;
- Les propos racistes à l’adresse des Amazighs émis par certains responsables de l’Éducation nationale (ceux de Ouarzazate et de Khémisset).
c)- Droit à une personnalité légale :
Que ce soit sur tout le territoire national ou dans les consulats à l’étranger, les autorités locales et les services de l’état civil marocains continue de pratiquer la discrimination à l’endroit de plusieurs familles amazighes. Leur crime : elles ont manifesté leur volonté de donner des prénoms amazighs à leurs nouveau-nés. Pour preuve, les cas de la famille Sifaou Ouâmmi à Figuig, Sifaou Bouhouche à Casablanca, Anir El-Idrissi à Rabat, Numidia Tin Ass à Lîlle en France et, enfin, Sifaou Aâzouz à Beni Tajit...
d)- Droit de s’organiser et de fonder des associations :
Plusieurs organisations amazighes sont toujours en attente des récépissés de légalisation en raison des atermoiements du ministère de l’Intérieur. Exemples : le parti démocratique amazigh marocain (PDAM) et toutes ses sections, l’association Andaz amazigh à El-Hajeb, l’association Imal à Masst, Association Izuran à Lakhsas....
c)- Droit de manifester et de se regrouper :
- L’interdiction à Marakech le 3 février 2007 du congrès constitutif du parti démocratique amazigh marocain (PDAM). Ce qui a fait que les congressistes se sont réunis dans la rue ;
- L’interdiction non justifiée faite à l’association d’Afra d’organiser à Tiznit un colloque portant sur l’amazighité et le développement humain ;
- L’intervention musclée des forces de l’ordre contre une manifestation spontanée et pacifique organisée suite à l’interdiction arbitraire du colloque d’Afra. Ce qui a fait plusieurs blessés plus ou moins graves parmi les manifestants ;
- L’interdiction le 18 mars 2007 d’une rencontre à Agadir, cette fois-ci, organisée par l’association Usman pour débattre d’ un livre, Un kidnappé sans adresse, de son auteur Said Bajji.
d)- Droit dans une vie digne :
- L’État continue toujours dans sa politique d’exclusion des régions amazighes ;
- Les victimes du tremblement de terre, qui a frappé El-Houceima dans le Rif, continuent toujours à souffrir dans le dénuement total ;
- La mort de plusieurs personnes âgées, d’enfants et de femmes (37 personnes en tout) et 15 avortements en raison du froid et de la faim dont a été victime plusieurs villages dans le Moyen Atlas (Anfgou, Tirghsin, Tighdwin...) ;
- La tentative de meurtre dont a été victime, Me Ahmed Adghirni, le secrétaire général du parti amazigh démocratique marocain (PDAM) à Rabat.
e)- droits liés à la terre :
- Les mafias de l’immobilier, avec la complicité avérée de quelques services de l’État marocain, s’approprient injustement et illégalement les terres des tribus autochtones dans plusieurs régions amazighes du Maroc.
f)- droit de s’exprimer librement :
- Les poursuites lancées par les mafias de l’immobilier contre le militant amazigh, Abdelaziz El-Ouzani (membre de la ligue amazighe des droits humains, président de l’association Ouzkan pour le développement), en raison de son intervention lors du colloque international organisé, collectivement, par la Ligue amazighe des droits humains (LADH), le Congrès mondial amazigh (CMA) et l’association Ouzkan pour le développement le 10 février 2007. Et ce pour discuter encore et toujours de la question épineuse de la terre.
- Le procès inique intenté à M. Brahim Ouzid, le correspondant du journal Agraw Amazigh et coordinateur du collectif Khaïr-Eddine des associations et des activistes amazighes dans le Sud. Et ce en raison d’un article publié dans le journal Annahar et traitant de la situation de l’habitat insalubre dans la commune rurale de Regada dans la région de Tiznit.
Revendications et recommandations :
1- La reconnaissance officielle des droits du peuple amazigh par la mise en place d’une constitution démocratique qui admet, ouvertement et clairement, l’amazighité du Maroc et l’officialisation effective de la langue amazighe ;
2- Respect des libertés fondamentales, liberté d’opinion et d’expression, droit de fonder des associations, de se rassembler, de manifester et de se déplacer librement ;
3- Mettre en place des politiques médiatiques, éducatives, judiciaires et administratives se basant sur l’égalité des langues nationales et respectant le droit des Amazighs et de l’amazighité, dans ses différentes expressions, dans tous les domaines de la vie ;
4- L’adaptation des lois de l’état civil avec les traités et les conventions internationaux et mettre fin à la politique d’interdiction des prénoms amazighs ;
5- L’annulation de toutes les législations, mises en place pendant la période du Protectorat français et toujours en vigueur, que les mafias de toutes sortes utilisent pour s’emparer des terres, des forêts, des mines des autochtones amazighs ;
6- La révision de toutes les législations pour les faire adapter avec toutes les conventions internationales sur les droits de l’homme et les ratifier, le cas échéant, tout en expurgeant tous les textes de lois de tout ce qui incite aux comportements discriminatoires.
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